vendredi 15 mai 2009

Faut-il proscrire le protectionnisme ?

L'un des effets positifs de l'acceptation du concept de "crise économique", c'est que des théories délaissées en période de prospérité sont de nouveau étudiées et que la réflexion intellectuelle, particulièrement sur l'économie et la société, s'en trouve relancée.

L'un des thèmes qui est réapparu lors de cette crise, c'est celui du protectionnisme, cette doctrine qui consiste à favoriser son marché intérieur en limitant les importations.

La tentation est grande en effet, dans un gouvernement démocratique, de vouloir fermer les frontières en temps de crise. C'est une mesure extrêmement démagogique, puisqu'elle se base sur l'instinct de rejet de l'étranger. En se dédouanant des économies étrangères, on devrait être capable d'influencer plus efficacement l'économie intérieure aux états et donc sortir de la crise.

Cette vision de l'économie est clairement fausse, et seuls les gouvernements à court de vraies solutions en viennent à ce genre de pratique.

Mais faut-il pour autant fustiger le protectionnisme avec la fougue des analystes de Bretton Woods ou les responsables du G20? Faut-il renoncer à tout protectionnisme sous prétexte qu'il est utilisé souvent à mauvais escient?

L'idée de base du protectionnisme peut paraître étrange dans un monde globalisé comme le nôtre. Si une grande structure peut fabriquer de grandes quantités à faible coût et l'exporter à d'autres grandes structures qui fabriqueront d'autres produits en échange, pourquoi vouloir limiter ces échanges, il est vrai extrêmement fructueux?
Mais les raisons qui soutiennent l'idée d'un protectionnisme sont assez simples à comprendre. D'une part, des petites structures agglomérées sont certes moins efficaces que des grosses structures réparties globalement, mais elles sont aussi moins sensibles aux différentes aléas économiques. La crise des subprimes n'a touché l'économie mondiale que parce que les centres financiers, puis les centres économiques, étaient inter-dépendants à l'échelle mondiale. Et les pays dont les groupes financiers principaux ont moins de produit à l'export, comme la France ou la Russie, ont été beaucoup moins touchés que des pays très ouverts sur le plan financier, comme l'Espagne ou l'Irlande.

D'autre part, pour une même valeur ajoutée produite, un ensemble de structures à grande échelle consomme plus de ressources qu'une multitude de petites structures. Ces ressources sont à la fois des ressources naturelles, des ressources intellectuelles et des ressources humaines. Certes, une usine en Chine fabriquant 500 poupées à la seconde consomme moins de ressources que cinq cents usines réparties dans le monde produisant 1 poupée à la seconde. Mais le passage de la poupée de Chine à sa consommatrice un peu partout dans le monde est extrêmement coûteux. Ce coût implique bien sûr le transport, mais aussi et surtout tous les services nécessaires, de la mise en place des transports aux gestion des marchés et des devises jusqu'à la publicité et la légalisation de la vente.

Enfin, les libre-échanges internationaux sont extrêmement désavantageux pour les producteurs primaires et secondaires. C'est pour cette raison que l'Union Européenne applique des restrictions importantes aux importations agricoles, restrictions qu'elle interdit d'ailleurs aux pays émergents avec lesquels elle commerce.

Bien sûr, il est aujourd'hui impossible de transformer toute l'économie globalisée en économie locale, et c'est justement pour cela que le protectionnisme modéré, qui oblige une reconsidération de l'économie sans interdire les échanges à grande échelle, doit être étudiée au niveau mondial. Quitte à accepter un ralentissement temporaire de l'économie mondiale.

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